Les Chemins de Porquerolles

Digressions sur les Randonnées de Porquerolles

Cité dans la Randonnée du Phare

le Cyprés de Lambert

 

cyprés de Lambert
Cyprés de Lambert à Porquerolles


Ce bel exemplaire de cyprés de Lambert qui trouve près du verger des Mûriers, non loin du cimetière; il est centenaire, dernier vestige d'une haie coupe vent.

C’est J F Fournier qui a introduit le Cyprés de Lambert dans l’Ile de Porquerolles lors de la création de son exploitation agricole, vers 1915, il avait acheté l’île en 1912. Peut être les avait il ramenés du Mexique. .

Cet arbre, son nom latin est « Cupressus macrocarpa » est un cyprés originaire des côtes de Californie, macrocarpa, signifie « à gros fruits », rappelle que les cônes femelles qui sont les plus gros rencontrés dans le genre Cupressus de 25 à 40mm. Ce cyprés peut atteindre 40m de haut et plus de 3m de diamétre. On l'appelle aussi Cyprès de Monterey du nom de sa région d'origine.

Son développement est rapide, dans son jeune age il peut pousser de plus d'un mètre par an, à l’age de 10 ans il fait la moitié de sa taille adulte, son tronc s’accroit de 8 à 10mm par an. Son bois, compact, rosé fait penser à un bois exotique, il est imputrescible et apprécié des sculpteurs à cause de son grain fin et de son homogénéité. Le feuillage, en forme d’écaille, est vert jaune dans sa jeunesse puis vire par la suite au vert brillant le feuillage est aromatique, son parfum rappelle la citronnelle

Cyprés de Plestin

Les premiers exemplaires européens ont été introduits en Angleterre vers 1838 par le botaniste Aylmer Bourke Lambert, d’où leur nom. ce cyprés a des caractéristiques qui en font un arbre adapté à l’île, il supporte les embruns, n’aime pas les étés trop chauds et se trouve à l’aise avec un degré hygrométrique élevé. Il a été planté dès le 19eme siecle, surtout sur la côte atlantique, dans les ïles et en Bretagne. Les tempêtes en ont détruits beaucoup mais il en reste des exemplaires isolés, qui sont pour la plupart des arbres classés ou remarquables : en Côte d’Armor, à Carnac, à Lannion Pornic, Belle Ile …

Signalons celui de Plestin-les-Grèves Avec ses 13 m de circonférence, 26 m d'envergure et 33 m de haut. Il a dû être un des premiers plantés en France et il a plus de 150 ans.

Pour expliquer comment cet arbre qui n'existe à l'état natif que dans deux petites vallées en Californie à pu se retrouver en Bretagne, il faut invoquer le Saint Esprit, ou plus exactement une congrégation religieuse : Les filles du Saint Esprit, cette congrégation est présente dans une douzaine de pays, et avait en particulier des établissements en Bretagne et en Californie!

La côte méridionale est beaucoup moins riche, on en trouve  à Hyères, a Saint Cyr sur mer, à Fréjus (Parc de la villa Aurélienne).... Porquerolles est la station méridionale probablement la plus riche. Il se reproduit ici naturellement, il existe même un jeune sous-bois vers le Brégançonnet.

Ce cyprès est considéré comme une espèce menacée et figure dans la Liste rouge de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN.)

J F Fournier en a fait planter plusieurs centaines, une allée vers la Langoustier, une autre vers les lagunes, beaucoup autour du village et des haies coupe vent au milieu de la zone cultivée, malheureusement ils ne vivent ici guère plus d'un siècle et nombre d'entr'eux, en mauvais état ou trop proches les uns des autres .ont été abattus.

Voici quelques exemplaires remarquables, tout d'abord une jeune pousse dans le Jardin Emmanuel Lopez, il ressemble à un feu d'artifice! et ensuite celui proche de la Villa Fournier

le nouveau
Le nouveau
l'ancien
L'ancien

Le cyprés de Lambert est un exemple récent d'une espèce introduite a Porquerolles qui s'est parfaitement acclimatée et fait partie désormais du paysage et du patrimoine de l'île. En fait tous les arbres de grande taille que l'on trouve dans l'île, sauf les pins d'Alep (une espèce envahissaante) et les pins maritimes, ont été introduits par l'homme à diverses époques.

Les arbres de Porquerolles

La végétation actuelle de Porquerolles dans les zones éloignées de l'influence humaine, est un maquis assez dense constitué majoritairement de bruyères arborescente ou a balais, d'arbousiers, de chênes verts et de pins d'Alep, avec quelques pins maritimes, sans oublier les myrtes genévriers et cistes. Les bruyères arborescentes atteignent ici des dimensions exceptionnelles, juqu'à 6m de haut et une circonférence de 50cm.

Quelle était la végétation primitive avant que l'ile ne soit colonisée par l'homme? On en a une idée assez précise grace à l'étude du charbon de bois des foyers des habitations de la Galère qui remontent au 2ème et 1ème siécle avant notre ére (L'environnement végétal de l'habitat antique de la Galère : etude anthracologique par Lucie Chabal)

La végétation était la même, avec une exception : il n'y avait pas de chênes verts! Ces derniers apparaîtront vers le 17ème siecle, comme partout en Provence, l'homme n'est pas étranger à cette arrivée, car les chênes verts se sont implantés préférentiellement sur des zones déboisées ou incendiées. On a trouvé également dans ces charbons de bois deux espèces cultivées : l'olivier et l'amandier. Les amandiers ont disparu, par contre les oliviers, revenus à l'état sauvage sont restés, par exemple sur la montagne des Mêdes où des moines ermites s'étaient implantés au 4ème siècle. Donc les oliviers sont les arbres les plus anciens, présents sur l'île, amenés par l'homme.

Après la période romaine qui a duré jusqu'au 6ème siecle, l'île n'a été habitée que de façon sporatique et il faut attendre le XVIème pour avoir une petite population installée à demeure , A partir de ce moment les importations d'arbres vont se succéder.

chataigner
Le plus vieil arbre de Porquerolles

C'est le moment de présenter le plus vieil arbre de Porquerolles, il s"agit d'un ... châtaigner, il est seul dans l'ile et dans la région il faut faire pratiquement 100km pour trouver des chataigneraies en haute provence. Il trone en haut du champ d'oliviers, dernier vestige d'une rangée de châtaigners plantés le long d'un chemin qui reliait directement le fort Sainte Agathe à la Gran Cale. ce chemin figure sur la carte de Cassini relevée en 1778.

Quel est le propriétaire de Porquerolles qui a voulu recréer dans l'ile le décor de son enfance? les archives nous donnent le candidat le plus probable : Alphonse D'Ornano Commandant des "Bandes Corses" qui a été nommé : Gouverneur et Capitaine du Fort de Porquerolles.en 1580. Il venait de Corse (où le châtaigner est largement implanté) et son régiment était en majorité composé de Corses. si cette hypothèse est exacte, cela donnerait à notre Chataigner un age de plus de 400 ans, ce qui paraît plausible. Le Parc est aux petits soins pour cette relique du passé.

Deux importantes plantations de plusieurs hectares : oliviers et chênes, sont signalés sur les anciennes cartes, mais on ne connait ni la date de plantation ni le donneur d'ordres.

La carte de Phélipeau qui date de 1680, fait apparaître un grand champ d'oliviers à l'emplacement du champ d'oliviers actuels, à la sortie sud du village, sur une superficie plus importante. Il y a plus de 300 ans que cette zone est consacrée aux oliviers, plusieurs génrations s'y sont succédées car périodiquement, disons une fois par siècle, une forte gelée détruit en grande partie les oliveraies.

Une carte de 1748 fait apparaître, au sud du hameau agricole, à l'emplacement actuel du bois des chênes, le "Bois de Louviers", il faut y voir une plantation de chênes assez importante, Actuellement des rejets ont remplacés les arbres d'origine. Louvier a du être un commandant de garnison. On se rappellera que Colbert avait fait planter des chênes partout en France et Porquerolles n'a pas fait exception.

Avant la Revolution nous voyons apparaître une plantation de chênes lieges, entre la plaine Notre Dame et le Mont des Salins. Le propriétaire de cette parcelle était Anne Gaspard de la Croix de Castries, qui avait acheté en 1764 le quart de l'ile a un des 4 frères De Lenoncourt. L'écorce de ces chênes lièges a été exploitée jusqu'au début du 20ème siècle. Un inspecteur des forêts G. DES CHESNES (Une excursion à Porquerolles) a visité l'ile vers 1886, il y avait alors 7000 chênes lièges, la quasi totalité sur le versant est du Mont des Salins. Il a écrit un rapport très intéressant sur la flore et la faune de Porquerolles a la fin de 19ème siàcle, pratiquement pas de différences avec l'époque actuelle.

Aprés la Révolution l'ile été gérée par les militaires puis progressivement ils se sont cantonnés dans quelques zones côtières ils ont créé le village vers 1825 et ils ont importés de nouvelles espèces.d'arbres

Dans son pamphlet les "fissures du Budget" Leon De Roussen qui fut propriétaire de Porquerolles de 1881 à 1905 nous fait l'historique des nouvelles plantations d'arbres sur la place, laissons lui la parole.

Sur la place du village, — la place d’armes, — on remplace les arbres manquants par des eucalyptus.
Les officiers venant d’Algérie ont tous la rage de l’eucalyptus.
Très curieux d’ailleurs, l’historique des plantations d’arbres sur cette place.
Plantation primitive d’un arbre qu’on appelle dans le pays « le belombra ». Il y a longtemps, longtemps.
Cet arbre pousse admirablement, il a une telle puissance de végétation que les racines pénètrent jusque dans les maisons voisines et soulèvent le sol. C’est gênant. On les abat. L’Etat les remplace par des ormes.
Les ormes prospèrent, ils sont grands et beaux quoique mutilés par des tailles malhabiles.
Ils se couvrent de feuilles chaque printemps, c’est bien naturel, mais ces feuilles attirent et nourrissent des chenilles qui de là pénètrent dans les habitations. C’est intolérable.
On en réfère à l’administration militaire.
Cette administration a une sainte horreur de la loi sur l’échenillage et au lieu de la mettre en application, elle décide que les ormes seront abattus et remplacés par des acacias.
Les acacias convenaient-ils aux habitants ? Je ne sais. Mais ce qui est certain, c’est que le terrain ne leur convenait pas. Il ne prospèrent pas et meurent successivement. C’est alors qu’on les remplace par des eucalyptus."

les Eucalyptus sont toujours là, sur la place et l'on retrouve le long de la Garonne, des traces de ces peuplements successifs: Il y avait jusqu'en 2015 un imposant Belombra qui devait dater de la naissance du village et qui a laissé quelques rejets, on y trouve également des acacias, qui poussent fort bien ici; des eucalyptus des ormes des chênes et même un chêne liège, en quelque sorte un souvenir vivant des plantations du 19ème siècle.

Revenons sur les eucalyptus, ils prospèrent bien ici et se reprduisent facilement. Les militaires les ont plantés le long des chemins, dans des zones un peu marécageuses... et il font maintenant partie du paysage. Ils ne sont pas sans inconvénients, le sol est stérile a leur pied, en cas d'incendie, ils brûlent comme des torches et enfin de grosses branches ou l'arbre complet peuvent tomber sans préavis, même par grand beau temps, a la suite d'un stress hydrique. Le parc avait entrepris de les éliminer, mais la tache était trop grande et la colère des habitants aussi! Actuellement la population est controlée seuls les arbres malades ou dangereux sont abattus.

Enfin,Jean Claude Brénac dans l'histoite de la Provencenous dit :

"1867 : le pin parasol ou pin pignon est introduit à Porquerolles"

Le pin parasol connaitra une grande diffusion, il ne vit guére ici au dela de 120 ans et ceux qui sont présents ont été plantés par Fournier et ses successeurs. Même le Parc en plante au bord des chemins!

Et Léon de Roussen qu'a t il introduit? Il rêvait de Porquerolles en village provençal avec une place ombragée par des platanes. il en a introduit quelques uns, il en reste quelques exemplaires, un peu chétifs, l'air marin ne doit guère leur convenir! Le parc ne semble pas avoir introduits de nouvelles espèces a haute tige, mais il a entretenu l'existant et a fait quelques plantations, par exemple les pins sur l'arrière de la Plage d'Argent. On lui doit l'importation d'un arbuste, le Gatillier (voir la 1ere randonnée), connu sous le nom de "poivre des moines" à cause des vertus anaphrodisiaque de ses graines.

Deux catastrophes écologiues ont largement contrarié l'extension des grands arbres: L'incendie de 1887 qui a ravagé une grande partie de l'ile et le départ de la Compagnie Foncière, propriétaire de l'île de 1905 à 1912. Cette société a fait faillite et comme ultime ressource, elle a abattu les arbres qui ombrageaient les chemins et les a vendu comme bois de chauffage.

C'est J F Fournier qui a modelé la végétation arborée actuelle, il a fait planter des centaines de milliers d'arbres et ce patrimoine, qui a eu son apogée dans le années 1960 1980 est toujours aussi remarquable.

Allée de pins parasols
Allée de pins parasols au hameau agricole